Dans son enseignement, Jésus osait contredire tout ce qui avait été dit avant Lui, car ce qui avait été dit avant Lui préparait l’humanité à entendre ce que Lui dirait.
Ainsi, même la loi juive fut décrite comme un pédagogue pour conduire à une relation personnelle et directe avec Dieu.
Ce courage prophétique s’explique par le contenu extraordinaire de l’enseignement que Christ dispense. Il lève le voile sur l’éternité, détache l’homme des contraintes religieuses, l’affranchit du joug du devoir sans amour, de l’obligation sans grâce, de l’exercice religieux sans contenu. Jésus peut dès lors affirmer que ses paroles ne passeront pas, puisque après l’oméga, il n’y a rien.
L’alpha est la première réalité de tout ce qui existe.
L’oméga en est la dernière.
Jésus inaugure et achève tout ce que la parenthèse de l’histoire universelle contient. Il arrache l’homme à la seule vision matérielle pour l’orienter vers la perspective de la durée infinie. Il intensifie la révélation par cette seule formule : “Mais moi, je vous dis”. Il instruit les siens de la sorte en vue de cette patrie céleste dont Dieu est l’architecte. Il le fait dans la connaissance de ce que sera la révélation des fils de Dieu qu’attend une création asservie.
La rédemption contient ce miracle de la transcendance.
Dieu parle par Christ en abolissant les frontières du temps, passé, présent et avenir.
Il “éternise” l’homme et fait de lui un citoyen des cieux. Il prépare une demeure aux siens, pour revenir, les reprendre, les garder avec Lui.
Là où Il sera, nous y serons aussi.
Mais sa contradiction systématique des idées religieuses reçues va faire de lui une pierre d’achoppement, un rocher de scandale, une folie pour tous ceux qui refusent le règne de la justice et de l’amour. Il sera rejeté. On ne fera de lui aucun cas. Il ira dans l’obéissance jusqu’à la mort de la croix, investi de la mission de renverser le doute, de préparer un édifice éternel.
Tant que nous ne sommes pas scellés de l’Esprit, unis les uns aux autres dans la paix, nous ne percevons que des lueurs indéfinies.
Nous ne voyons pas encore briller la splendeur de l’Evangile. Nous ne réalisons pas réellement la magnificence de Christ.
Mais quand survient l’illumination que l’Esprit accorde à ceux qu’Il a choisis d’avance, les paroles résolues et décisives du Seigneur ne choquent pas. Elles s’inscrivent dans la cohérence d’un plan éternel.
Dans la cité de Dieu, d’autres règles sont en vigueur que celles des systèmes institutionnels. Ces règles s’apparentent à l’Etre de Dieu, dépendent de la lumière, de la sainteté, de la grâce, de la miséricorde, de l’amour invincible, de la joie du règne de l’Agneau, de la victoire sur les forces des ténèbres.
Ces règles supposent que soit pris au sérieux chacun des mots prononcés par le Seigneur.
Quand Il déclare: “Mais moi je vous dis”, celui qui l’entend laisse s’effacer ce qui précède, fait taire ce qui le distrait. Il ne voit que Jésus, n’entend que Jésus, ne veut que Jésus. Plus s’opère la conformité avec Christ, plus il s’éloigne des slogans, des artifices, des méthodes sophistiquées. Sa seule aspiration se résume à entendre le Bon Berger lui indiquer le chemin, même si le Bon Berger réfute les évidences pour proposer son chemin étroit. Dans notre âge complexe, n’avoir que Jésus produira la contradiction. Elle s’exprime de mille manières, car l’antagonisme spirituel n’est jamais franc et frontal.
Un défi nous est lancé quand nous entendons le Seigneur ralentir notre course, orienter notre marche, fermer une porte, en ouvrir une autre.
De notre réaction dépendent bien des conséquences.
Nous Le laissons modifier ce qui doit l’être, corriger nos décisions, relativiser nos opinions. Il n’est Seigneur, devant qui tout genoux fléchira, que s’Il peut bousculer les inébranlables certitudes, les savantes programmations psychologiques, les subtils conditionnements culturels, par une simple phrase : “Mais Moi, je vous dis”
Mickaël Berreby