Méditations

Aime ton prochain

A la question divine suite au premier meurtre, l’assassin Caïn le laboureur ne répondit que par une question sournoise.
Le créateur lui demanda :
— Où est ton frère Abel ?
Il répondit :
— Je ne sais pas ; suis-je le gardien de mon frère ?
Et Dieu dit :
— Qu’as-tu fait ?

Le châtiment de Caïn lui sembla énorme et Dieu décréta que si quelqu’un le tuait, Caïn serait vengé sept fois.
Et voici promulguée la loi inexorable de la violence aveugle. Car Abel et Caïn ont été tués des millions de fois depuis.

Mais plus grave que la mort, c’est sa justification qui est en vogue, sa légitimité qui est énoncée en termes religieux, sa nécessité qui est soulignée comme un acte de justice par d’autres.

C’est dans ce monde à la dérive que l’Eglise reçoit le commandement d’aimer.
Oui, nous sommes les gardiens et les garants de nos frères et de nos soeurs, de nos prochains. Et cette terre boit quotidiennement le sang de victimes innocentes frappées par la main criminelle de lâches inspirés par la haine.

Nous n’avons jamais quelques jours de répit sans entendre qu’ici ou là, sur notre planète déchirée, des bombes explosent pour éliminer l’autre et semer la terreur.
Nous ne vivons pas dans un âge paisible et nous ne vivons pas dans la paix. Toutes les gares et tous les aéroports sont équipés de caméras de surveillance, et les polices du monde entier redoutent le terrorisme.

« Tu ne tueras point ».
« Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Lévitique 19:18), qu’il soit blanc, noir, arabe, juif, jaune, riche, pauvre, savant, ignorant, aimable ou détestable…
Tu l’aimeras tel qu’il est, car si tu ne l’aimes pas, tu transgresses la loi de Dieu et tu te rends coupable de meurtre.
Ne médite pas le mal contre ton prochain, lorsqu’il demeure tranquillement près de toi (Proverbes 3:29).

Mais Jésus le Christ, le Sauveur et le Seigneur que nous confessons, va beaucoup plus loin :
« Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent, afin que vous soyez fils de votre Père qui est dans les cieux ; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et il fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes. Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense méritez-vous ? »

Pour Jésus, ce commandement est semblable au premier : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton coeur, de toute ton âme, et de toute ta pensée ».
Nous devrions éprouver une honte et une répulsion devant la haine de l’homme à l’égard de son prochain.

Et si nous tolérons la moindre faiblesse devant le racisme, nous sommes potentiellement des meurtriers.
Si les politiciens pratiquent la discrimination “respectable”, ils enfreignent la loi divine et s’exposent à la sanction divine. Car l’homme est le même partout.

Mais la Parole admet que le Père qui est dans les cieux fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et qu’il fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes.
La seule distinction possible est celle qui différencie les bons des méchants, et les justes des injustes.
Paul écrit aux Galates : « mais si vous vous mordez et vous dévorez les uns les autres, prenez garde que vous ne soyez détruits les uns par les autres ».

L’amour se décide. Il n’a pas besoin d’être éprouvé et ressenti en vagues d’émotions fortes. Il se décide par obéissance et s’applique par fidélité. Si les sentiments font défaut, l’amour leur est supérieur.
Il est autonome et dispose d’une autorité plus crédible que l’émotion fugace d’un instant.

Mais puisqu’il s’oppose aux lois terrifiantes qui régissent ce monde, il lui faudra paraître dur comme le diamant ou tendre et sensible, au risque de ne plus correspondre à rien de ce que prône notre âge de démence.

Tout espérer, tout supporter, tout croire, se réjouir de la vérité, ne jamais soupçonner le mal, ne pas s’irriter, ne pas se vanter, ne pas s’enfler d’orgueil, est-ce de cet amour dont il s’agit ?

Si l’Eglise le pratiquait, cet amour “invraisemblable”, ce serait sans doute l’anéantissement radical du règne des ténèbres, la révélation des fils et des filles de Dieu, la démonstration d’une puissance supérieure à la mort.

Mickaël Berreby

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